Régulation : La France est-elle vraiment supérieure en Europe ? Arnaud Touati émet des doutes
Alors que Surfin’ Bitcoin battait son plein, Arnaud Touati, avocat spécialisé dans les nouvelles technologies, a tenu à « remettre les pendules à l’heure », notamment au sujet du passeport MiCA.
Passeport MiCA : la portabilité au sein de l’Union européenne
Il y a peu, le premier volet de MiCA entrait en action. Celui-ci permettait essentiellement de réguler les stablecoins, mais pas seulement. Le texte énonçait également les démarches pour toute entreprise européenne qui réalise des services sur crypto actifs.
En parallèle, de nombreuses entreprises se plaignent des coûts et de la longueur des démarches relatives à leur enregistrement.
Bientôt, le passeport MiCA proposera quelque chose de plus fort : la portabilité. Ainsi, qu’une entreprise soit enregistrée en France ou dans n’importe quel autre pays de l’UE, son agrément aura la même valeur et lui permettra de viser l’ensemble du marché européen, quel que soit le pays dans lequel ledit agrément aura été obtenu.
Une bonne nouvelle pour les entreprises hors France qui pourront alors bénéficier du même statut tout en se plaçant dans un autre pays.
Quid du dumping ?
Arnaud Touati est avocat spécialisé nouvelles technologies et co-fondateur d’Hashtag Avocats. Il travaille donc avec de nombreux acteurs concernés par MiCA et la régulation crypto en général.
Entre deux panels, à Surfin’ Bitcoin, le juriste a tenu à clarifier la situation de certains acteurs qui choisissent de s’internationaliser. Pour lui, si la France est aujourd’hui en pole position en terme réputationnel, cela pourrait ne pas suffire :
« Pour l’instant, dans l’UE, nous avons des réglementations qui sont différentes d’un pays à l’autre. Cependant, demain, nous serons sur quelque chose d’unifié. On ne pourra donc plus parler de dumping puisqu’il s’agit d’un seul et même territoire », explique-t-il au sujet du passeport MiCA.
En effet, l’arrivée du passeport MiCA permettra une universalisation, au niveau européen, des pratiques et des normes concernant les entreprises crypto.
Se réguler ailleurs et filialiser en France
Il semble cohérent que de nombreuses entreprise puissent, bientôt, se tourner vers d’autres pays au sein de l’espace européens.
« La question qui se pose également, c’est « va-t-on avoir des entreprises françaises qui vont aller se réguler à l’étranger pour ensuite créer des filiales en France ? ». C’est en tout cas ce qui se fait dans la réglementation financière traditionnelle. Il n’y a rien de neuf et je pense que cela se fera également au sein de l’écosystème crypto, d’autant que la réglementation MiCA est une adaptation de la réglementation financière aux actifs numériques. Il faudra en revanche que le régulateur européen ESMA veille à une vraie harmonisation dans l’application des textes par les régulateurs des 27 pays de l’Union ».
Dans les faits, et même si MiCA est largement inspiré du PSAN français, force est de constater que les délais sont longs et les coûts significatifs, comme le rappelle Arnaud Touati :
« Si vous êtes français, la logique veut que vous alliez vous réguler en France en priorité et c’est ce que nous allons recommander à nos clients. La réalité, c’est qu’en termes de fiscalité, cotisations sociales et célérité, il n’est pas exclu que d’autres juridictions soient in fine plus intéressantes. MiCA est un règlement européen qui est unifié dans toute l’Europe, ce n’est donc plus la réglementation qui sera le critère d’ajustement. La France a un haut niveau de fiscalité et de cotisations sociales. Le régulateur, lui, est très compétent mais il a des effectifs moins pléthoriques que certains de ses homologues européens. Il n’est donc pas choquant de voir un acteur français envisager de se développer dans un autre pays Européen pour obtenir un agrément et décider ensuite de filialiser en France. Cela demande une réelle substance dans le pays d’agrément mais ce n’est pas problématique par principe pour des projets à vocation internationale et c’est d’ailleurs en adéquation avec l’Europe dont je rappelle qu’il s’agit d’un marché unique. »
Une question de réputation
De nombreux experts du secteur pensent que les entreprises enregistrées en France bénéficient d’une meilleure renommée que les autres. Toutefois, avec l’arrivée du passeport MiCA, quelle sera la réelle différence entre une entreprise agréée en France et une entreprise agréée par exemple à Malte comme OKX ?
Sur le plan légal, aucune différence. Les deux entreprises devront se soumettre aux même règles. Et sur la réputation, cela peut-il réellement être préjudiciable que de s’agréer dans un pays balte par exemple ?
« A ce stade, je ne le pense pas même si ça reste à confirmer. Du point de vue investisseurs, on va chercher la rentabilité maximale et l’économie fiscale et sociale sera substantielle par rapport à la France. Du point de vue clients, je doute fortement que ceux-ci privilégient une société agréée en France vs une société agréée à l’étranger avec une filiale en France, vu que le droit qui leur sera applicable sera identique. Ce qui compte pour le client, ce sont les coûts et il est fort à parier que l’économie sociale et fiscale réalisée permettra de réduire les coûts utilisateurs. CQFD »
Ainsi, sur le papier, le passeport MiCA devrait permettre une uniformisation certaine. Cependant, chaque pays continuera d’aller à son rythme et, en la matière, il n’est pas acquis que la France soit en pole position.
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